Comment la série moderne transforme notre vision du petit écran : épisode 3

Le format "série", un phénomène de société.

Du "restau & ciné" au "Netflix & chill"

Cet article est le troisième d'un tryptique. Si vous n'avez pas encore lu le premier ou le second épisode, vous les trouverez respectivement ici et ici.

Au cours de la dernière décennie, l'industrie cinématographique a connu une évolution largement remarquée, et qui a même pu surprendre les professionnels du secteur. Alors que dans les années 90 et au début des années 2000, les séries télévisées à succès existaient certes (il suffit de penser à Friends, qui a été la série la plus regardée des services de streaming l’an dernier, vingt-cinq ans après sa sortie), la grande star de l'écran demeurait le cinéma. Aujourd'hui, bien que le cinéma occupe toujours une place très importante dans la vie de beaucoup de gens, le "petit écran" a pris un rôle beaucoup plus central pour une très grande partie de la population. Avec l'avènement des services de streaming à la demande, cette dynamique n'a fait que s'amplifier. Mais comment sommes-nous passés de "restau & ciné" au "Netflix and chill" en moins d'une décennie?

 

Dernière modification le : 02.04.2021

Des investissements monétaires en forte hausse

Bien sûr, bien qu'il existe des exceptions, comme « Game of Thrones » mentionné dans l’un des précédents épisodes, il reste rare de trouver une émission de télévision ayant la même valeur de production qu'un blockbuster hollywoodien qui a fait ses preuves. Cela dit, l'investissement dans les séries est en constante augmentation, et on en voit clairement les résultats sur le petit écran. En règle générale, les investissements monétaires réalisés sur les marchés américains sont plus élevés que ceux des marchés européens. Le coût moyen d'un épisode "blockbuster" produit aux États-Unis se situe entre 3 et 10 millions de dollars par épisode, tandis que le coût moyen d'un épisode européen oscille entre 800 000 et 1,2 million d'euros1. Ce déséquilibre budgétaire explique en partie la valeur de production plus élevée que les émissions américaines sont capables d'atteindre, et en partie la raison pour laquelle les émissions européennes s'appuient davantage sur le genre "cinéma d'auteur" pour de nombreuses séries produites dans l'Union européenne. 

 


1. LAURICHESSE Hélène (dir.), « Etude préliminaire sur le secteur des séries TV en Europe et dans la région Euro-Méditerranéenne », Toulouse, FIEST, 2018, p.17

Dernière modification le : 02.04.2021

Un investissement émotionnel beaucoup plus élevé

L'autre avantage que les séries ont sur les films, est très clairement une autre forme d'investissement. Il s'agit de l'investissement émotionnel du public. Une série qui s'étend sur vingt épisodes de trente minutes chacun, a une bien plus grande possibilité de développer les personnages, de les étoffer de toutes les façons, de les rendre sympathiques et appréciés par le public.

Les personnages étoffés que le petit écran offre, assurent aussi que les gens reviendront inévitablement à la série, car ils sont investis dans leur vie. Ils veulent savoir ce qui leur arrive. C'est pourquoi ils reviennent sans cesse. Il faut également noter que sous l'influence des services de streaming, une nouvelle façon de consommer le contenu est apparue. On parle évidemment de ce qu'on appelle aujourd'hui le "Binge watching", c'est-à-dire regarder une série entière en une seule séance ou en un petit nombre de séances. Cette nouvelle façon de consommer le contenu a à son tour changé la façon dont les scénaristes créent les spectacles. Comme la série est regardée en succession rapide, il n'est pas nécessaire d'avoir des "cliff-hangers", car il n'est pas nécessaire de forcer les gens à revenir après une pause publicitaire ou pour l'épisode suivant². Les services de diffusion en continu examinent désormais la manière dont leurs émissions sont regardées (que ce soit en mode intensif ou en séances multiples) et adaptent l'écriture en conséquence³. 


2. « L’étude de la production des séries américaines » CSA, 2016.

3. LAURICHESSE Hélène (dir.), « Etude préliminaire sur le secteur des séries TV en Europe et dans la région Euro-Méditerranéenne », Toulouse, FIEST, 2018, p.40

Dernière modification le : 02.04.2021

La fin de notre série.

Tout cela conduit à une sorte de concordance parfaite des circonstances pour l'industrie des séries. La crise sanitaire actuelle n'a fait que s'ajouter à ce phénomène déjà existant. De plus en plus d'acteurs, de producteurs et de réalisateurs affluent vers le petit écran, qui connaît aujourd'hui réellement un âge d'or.

Dernière modification le : 02.04.2021

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